Le bop n’a pas donné que des musiques trépidantes ou excitées. Tandis qu’un mouvement le perpétuait, un autre a eu tendance à s’assagir avec des tempos plus lents, des sons plus épurés, plus approfondis peut-être. C’est le mouvement ‘cool’, dont l’un des chefs de file est Miles Davis.
Ceci induit des pratiques spécifiques, comme l’art du contrepoint (presque comme un ‘revival’ de Bach !), mais aussi une approche sans doute plus intellectuelle que lyrique, plus théorique que tripale, à l’inverse justement du hard-bop.
Par réaction, on rompt également à la virtuosité qui est parfois interprétée, par les détracteurs du bop, comme de la démonstration gratuite ou de la recherche de mise en avant. On retrouve des sonorités plus ancrées dans une vision du monde un peu cinématographique. Par exemple, le ‘West Coast’ est un jazz blanc très souvent utilisé en musiques de film dans les années 50.
Le piano est l’instrument idéal du cool jazz. Par sa profondeur harmonique, il permet de détailler et d’approfondir des accords simples sur le papier, mais très élaborés du point de vue de l’interprétation. Certains pianistes comme Bill Evans en ont fait leur signature. Ce jeu est immédiatement reconnaissable, et a été intégré définitivement par tous les pianistes jazz ensuite, quels que soient leur courant.
On y reconnaît souvent une véritable influence des impressionnistes français, de Fauré à Debussy en passant par Ravel ou Chopin. On y voit aussi un choix délibéré de ne jamais empiéter sur les basses fréquences pour laisser la contrebasse développer les accords et faciliter des contrepoints.
Il apparaît que le cool est une étape majeure d’approfondissement de l’harmonie modale, malgré bien sûr toutes les avancées du bop en la matière, en ce que le son recherché est justement l’essence des accords utilisés, dans toute la profondeur de leurs couleurs et résonances.